L’appelé en Algérie.
Cette fois tu étais arrivé dans ce pays tellement redouté et te voilà seul ce soir dans
ton lit sous ta moustiquaire pour cette première nuit. Dans ta tête bouillonnent une multitude d’images. Tu as envie de chialer, est-ce la bière que
tu as trop bue, ou alors la tristesse qui t’envahit par cette solitude lointaine de ta chère France, ton village tous tes amis ?
Tu t’endors avec ce mal-être qui ne quittera plus jusqu’à la quille.
Le lendemain, te voici de nouveau sur pied, que la nuit a été courte, tu te sens las et
à envie de rien. Quelles drôles de tête ont les gradés, déjà tu n’aimes pas leur allure, ils semblent si sûrs d’eux. Tu as hâte de les voir dans un accrochage pour observer leurs actes.
Maintenant te voilà au jus du matin, du pain rassis, de la confiture de marrons,ou des
sardines. Tout ce que tu n’aimes pas, et le café tiède du vrai jus de chaussette sans goût ni couleur. Tes copains ne semblent pas plus joyeux que toi, mais font semblant que tout aille
bien.
Le rassemblement te voici au garde-à-vous sous un soleil déjà harassant dans ton
treillis bien trop grand et tes rangers qui te serrent les pieds, ta cartouchière qui te rentre dans la peau, ton sac à dos chargé te blesse les épaules, et ce fusil que tes mains cramponnent en
dégoulinant de sueur, putain que c’est lourd ce bordel et il va te falloir crapahuter avec tout ça ?
Tu n’écoutes pas ce que dit le capitaine, tu es encore là-bas dans ton village, tu vois
le sourire de ta belle, tu repenses à ton départ et tu revois son image. Tu as comme une boule dans la gorge qui t’oppresse, avec un goût amer dans la bouche.
Encore une fois tu as envie de chialer, bon sang que fais-tu ici ? puis tout le
monde embarque dans le GMC. Maintenant, tu réalises que tu entres en guerre et qu’il va te falloir mettre de côté tes pensées. Tu es un soldat appelé pour défendre une province française.
Heureusement, tu n’es pas seul et la camaraderie viendra vite effacer ton mal-être de
tes débuts en Algérie au service du maintien de l’ordre.
Au diable tes états d’âme !
Francis Mauro votre webmaster.